Face à l'escalade de la guerre, lutter pour la paix véritable - ÉDITO

On dit qu'il y a une escalade dans la guerre, c'est vrai. Au Proche-Orient, c'est une escalade d'un genre nouveau: prévisible, transparente et lente. D'abord, Netanyahou provoque l'affrontement avec l'Iran. En attaquant, le jour de la fête nationale iranienne, le consulat du régime des mollahs à Damas, le dirigeant israélien a commis une provocation que l'on pourrait juger inconsciente et absurde. Elle ne l'est pas. L'objectif de Netanyahou est l'extension du conflit, pour pouvoir continuer le massacre sanglant des palestiniens, qu'il convient désormais de qualifier de génocide. En effet, sans cette espèce de diversion, les actions israéliennes à Gaza devenaient inacceptables même pour les soutiens les plus inconditionnels de cet État. Après cette provocation, la réplique iranienne ne pouvait conduire qu'à l'augmentation du seuil de la guerre. C'est le cas. Il s'agit donc presque d'une escalade ex nihilo. A partir de rien, ou plutôt d'une tension latente, dans laquelle chacun des ennemis qualifie l'autre d'ennemi mortel. En temps de guerre, chacun justifie ses positions par des narratifs bien huilés.
Il y a donc des narratifs qui s'affrontent et s'alimentent à nouveau, et ce dans tous les pays engagés de près ou de loin dans cette guerre.
Du côté d'Israël, on doit bien se défendre face à une agressivité arabe menaçant tout le camp occidental, aussi appelé camp de la vérité, de la liberté ou de l'universel. C'est la bien connue guerre du bien contre le mal, de la civilisation judéo-chrétienne contre le monde musulman. Ce récit s'appuie sur quelques réalités et aussi beaucoup de mensonges. Il s'appuie aussi sur le rattachement de tous les juifs à Israël, et de tous les musulmans à l'antisémitisme. On passera sur le fait que la plupart des plus fervents soutiens d'Israël ne sont pas dénués d'un antisémitisme toujours présent, et qu'en Amérique par exemple, une communauté juive très courageuse dénonce ce narratif et le massacre et la colonisation qu'il justifie. Mais bon, c'est comme cela, cette pensée va continuer de s'étaler face aux partisans de la paix s'opposant à la destruction des Palestiniens.
Ensuite il y a l'Iran, et il faut bien admettre que si Netanyahou cherchait un ennemi absolument détestable c'est bien trouvé. L'Iran s'appuie sur le deux poids deux mesures des pays occidentaux, et la non-condamnation de l'attaque du consulat à Damas va dans ce sens. Ne soyons pas dupes pour autant: ce régime n'en a rien à faire de la libération des Palestiniens et se sert de l'opposition au sionisme comme d'un outil pour maintenir une forme d'ordre politique interne. On rétorquera à ceux qui vont dénoncer cette escalade absurde qu'ils soutiennent l'Iran, régime affreux, avec un peuple sauvage et antisémite (avec toujours une islamophobie comme appui à ce narratif). Non. En aucun cas nous ne pouvons compter avec l'action d'un tel régime que nous haïssons, et encore moins de cette réplique qui s'inscrit dans une volonté d'escalade. Une régionalisation du conflit se fera au détriment du peuple palestinien, déjà plongé dans une misère inédite. Refusons aussi de cautionner les attaques contre des populations civiles comme mode d'action face à l'oppression coloniale, nous y perdons notre humanité.
Nos adversaires, c'est-à-dire les partisans de la guerre et du capital, ont pris parti depuis déjà longtemps en faveur du narratif de Netanyahou, et à travers celui-ci d'un néoconservatisme décomplexé. En tant que force syndicale internationaliste, nous devons absolument organiser la riposte en France face à cet engrenage de guerre, et contre la propagation des racismes quels qu'ils soient, qui prendront ce conflit comme prétexte pour diviser le peuple.
Il faut, en premier lieu, en revenir à la paix. Et ce avec les mots d'ordre qui sont les nôtres depuis le début: cessez-le-feu immédiat, libération des otages, fin de la colonisation. La retenue et la désescalade face à l'engrenage de la guerre totale, aussi. Une paix de cet ordre est indispensable: il faut que cessent les armes et l'escalade impérialiste entre Iran et Israël. Cependant, l'arrêt des combats ne suffit pas. Nous ne voulons pas de la "paix" d'avant, du statu quo. Nous voulons la paix véritable, au sens de Jaurès. Ce sera celle de la fin de la colonisation, fin de l'oppression des Palestiniens. Allons plus loin, nous voulons la paix révolutionnaire, fin de la séparation entre juifs et arabes qui a fait couler trop de sang. C'est utopiste ? Non. L'utopie c'est de penser que ce qu'il se passe de la Mer au Jourdain peut continuer sur un modèle de séparation et de catastrophes enchainées, puisque ce modèle ne conduit qu'à l'effusion de sang.
Nos revendications doivent être suivies d'effets: que le 1er mai, les lycéen·nes sortent aussi dans la rue contre la guerre au Proche-Orient. Que la mobilisation pour la paix soit générale, puisque la guerre est absurde face à l'effondrement climatique et social. Puisque nous ne pouvons pas compter sur la bonne volonté des chancelleries pour faire la paix, nous aurons nos mots d'ordres. Halte à la terreur, halte à l'engrenage vers la guerre totale, en Israël-Palestine: brisez le mur de l'Apartheid !